La signification des jugements sanctionnée par la Cour constitutionnelle

L’article 43 du Code judiciaire dresse l’inventaire des mentions que doit comporter l’exploit de signification d’un jugement par voie d’huissier de justice. Cet inventaire ne vise ni les voies de recours, ni le délai dans lequel ce ou ces recours doivent être introduits, ni la dénomination et l’adresse de la juridiction compétente pour en connaître.

Ces mentions sont en revanche imposées à peine de nullité par l’article 792, alinéa 3 du Code judiciaire en cas de notification faite par le greffe en matière de sécurité sociale et d’adoption.

Une entreprise de promotion immobilière qui avait déposé sa requête d’appel hors délai a invité la cour d’appel de Mons à interroger la Cour constitutionnelle sur la différence de traitement qui est ainsi faite entre le justiciable qui se voit notifier une décision par le greffe et celui qui se voit signifier un jugement par un huissier de justice.

S’appuyant sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, la Cour constitutionnelle belge a rappelé tout d’abord, aux termes d’un arrêt du 10 février 2022 (arrêt n° 23/2022), qu’« afin de garantir le droit d’accès au juge, il importe non seulement que les règles concernant les possibilités des voies de recours et les délais soient posées avec clarté, mais qu’elles soient aussi portées à la connaissance des justiciables de la manière la plus explicite possible, afin que ceux-ci puissent en faire usage conformément à la loi ».

La Cour a souligné ensuite que « l’indication de l’existence des voies de recours dans la signification d’une décision juridictionnelle constitue un élément essentiel du principe général de la bonne administration de la justice et du droit d’accès au juge. Le droit d’accès à un procès équitable exige en effet non seulement que les possibilités et délais pour exercer des voies de recours soient posés avec clarté, mais aussi qu’ils soient portés à la connaissance du justiciable de la manière la plus explicite possible. Il s’agit là de l’objet même d’une signification, qui est d’informer le justiciable ».

La Cour constitutionnelle en a conclu qu’« en ce qu’elle ne prévoit pas que, lors de la signification d’un jugement, il y a lieu d’indiquer les voies de recours, le délai dans lequel ce ou ces recours doivent être introduits ainsi que la dénomination et l’adresse de la juridiction compétente pour en connaître, l’article 43 du Code judiciaire viole les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec les principes généraux garantissant le droit d’accès au juge ».

Afin de préserver la sécurité juridique, la Cour constitutionnelle a toutefois pris soin de préciser que les effets des significations qui ont été ou seront effectuées conformément à l’article 43 du Code judiciaire sont maintenus jusqu’à l’adoption, par le législateur, d’une disposition garantissant que, lors de la signification d’un jugement, les mentions évoqués ci-dessus soient portées à la connaissance du justiciable, étant précisé que l’intervention du législateur est attendue d’ici le 31 décembre 2022 au plus tard.

Le législateur est donc invité à modifier rapidement l’article 43 du Code judiciaire afin que ce dernier prévoie qu’à peine de nullité, toute signification d’un jugement par voie d’huissier doit indiquer les voies de recours, le délai dans lequel ce ou ces recours doivent être introduits ainsi que la dénomination et l’adresse de la juridiction compétence pour en connaître.